dimanche 13 mai 2012


La nécessité de l'éthique

Un consensus semble émerger ; nous avons besoin de plus d'éthique pour éviter la catastrophe. À première vue, ce point de vue tombe sous le sens. Mais en regardant le problème de plus près, on se rend compte qu'il serait préférable de parler d'éthique et de valeurs (pas au sens monétaire) en premier. Pourquoi? Tout simplement parce que si catastrophe il y a, si problèmes graves il y a, c'est parce que nous sommes guidés par un écosystème de valeurs qui sont, à quelque part, la cause desdits problèmes. Mais avant d'aller plus loin, je me dois de définir ce qu'est l'éthique.

Qu'est-ce que l'éthique? Question difficile je dois avouer, surtout si je ne veux pas assomer le lecteur avec l'histoire riche de ce domaine. En résumé l'éthique, ou la morale, peut se diviser en deux grandes approches : la déontologie (voir Rousseau, Kant, Rawls, Habermas) et la téléologie (voir Aristote, Bentham, Stuart Mill, Signer). La première approche concentre son attention sur ce qui est bon en soi, la deuxième quant à elle se concentre sur la finalité des actions ou encore sur leurs conséquences, volontaires ou involontaires. La première tend à monter un système promouvant des valeurs ou des vertus jugées bonnes en soi, peu importe les conséquences, la deuxième tend au contraire à se coller sur les conséquences. Bien entendu, parler d'éthique dans un cours portant sur le progrès porte l'esprit à réfléchir sur les conséquences de nos actions, mais également sur les valeurs qui les sous-tendent. Les approches en éthique de l'environnement sont donc généralement conséquentialistes. En somme, l'inquiétude morale soulevée par des notions comme l'anthropocène ou encore par l'entropie des écosystèmes relève des conséquences et non d'une approche déontologique. Mais il est essentiel de nuancer. En effet, il faut se rappeler que jai fait référence à des valeurs dans lintroduction.

Quelles sont ces valeurs à lesquelles je faisais référence en introduction? Transformation de la nature en réservoir de valeurs monétaires. Compétition exacerbée. Fragmentation sociale. Individualisme déconnecté. Raison réduite à sa forme technique et instrumentale pour le contrôle de la nature et des êtres humains. Si ces valeurs engendrent nombre de problème, il s'agirait alors de les renverser pour faire place à d'autres valeurs, anciennes et nouvelles. L'amour devrait être mise de l'avant, c'est le point de départ et le point d'arrivée du processus de renversement des valeurs. L'amour implique aussi l'ouverture et le respect. Ouverture à soi, aux autres, au monde extérieur. Respect pour ce qui nous fait vivre. Par ailleurs, les valeurs du partage et de la collaboration devraient être également au rendez-vous. Un aspect fondamental serait de redonner les lettres de noblesse à la Raison. Porter un regard holistique sur les choses me semble être une condition sine qua non d'un retour à un état de plénitude qui permettrait de mettre au diapason être, action et monde. Ce regard plus ouvert sur le monde permettrait aussi de mettre l'accent sur le commun plutôt que sur les fragments. Il s'agirait par conséquent de repenser le commun pour comprendre que les fragments sont, oui, essentiels, mais les fragments pris isolément n'ont aucun sens. Une voie pour voir le commun : valoriser les relations. Il faut aussi mettre en valeur notre place dans le monde, place dans le sens de territoire. Individuellement et collectivement nous ne sommes pas en mesure de saisir limportance capitale de notre relation intime avec le territoire. Bref, on a appris à être déconnecté du territoire, tandis quil est urgent de reconnaître quil est en nous et que nous sommes en lui. Petit rappel : la déconnection des sociétés contemporaines par rapport aux territoires génère un nombre effarant de conséquences (voir mon billet sur lentropie).

Lintention derrière ce court billet était dintroduire l’éthique et ses courants principaux, du moins dans le monde occidental. Le lecteur ou la lectrice comprendra par conséquent quil ne pouvait pas constituer un panorama exhaustif des différents courants éthiques traversant lhumanité. L'éthique a été l'apanage des religions et de la plupart des courants philosophiques. Or, force est de constater que leurs bonnes idées n'ont malheureusement, ou heureusement, pas pris prise (la notion de prise a été analysée par Augustin Berque - pour résumer nous devons reconnaître les prises que nous avons avec le Réel ; il faut aussi créer de nouvelles prises). Il faut donc renouveler l’éthique, notre éthique, et ce, dans nos valeurs et dans les conséquences de nos actions. Vous en déduirez que ma position éthique relève autant du courant déontologique que du courant téléologique. Il faut sattarder autant aux valeurs quaux conséquences voulues de nos actions.


Simon

1 commentaire:

  1. Merveilleuse article! Il est vrai que la société ne change pas s'il n'y a pas un changement dans 1)la situation géopolitique
    2)les acteurs du monde (le genre humain en particulier)
    Voici donc une approche différente. Depuis le temps que nous sommes informé des effets pervers de la société sur l'environnement ainsi que sur nous-même, peu de chose change. Maintenant, comment changer l'éthique? Est-ce par le biais de l'éducation? Je crois que ça constitue une part de la solution mais il faut plus que ça. Des gens qui entreprennent de montrer l'exemple? Probablement que ce partenariat pourrait pousser l'éthique dans la bonne direction.
    Poursuivez votre merveilleux travaille! Nous verrons d'ici quelques années si le projet donne fruit.

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